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Sensibiliser les collégiens à la lecture de la musique : l’apprentissage de la musique auprès d’un public jeune

Maxime Proix est un enseignant certifié d’éducation musicale et chant choral. Avant de travailler dans l’Éducation Nationale, il a réalisé un mémoire de recherche sur la musique des Studios Disney et son utilisation à Disneyland Paris. Il est aussi saxophoniste et est diplômé de direction d’orchestre. Fort de toutes ces expériences, Maxime Proix apporte ici son savoir-faire pour nous expliquer la démarche de sensibilisation des jeunes collégiens à la musique.

« J’ai solfège » ou « j’ai musique, on s’en fiche, c’est une sous-matière » : ces deux phrases sont entendues et répétées génération après génération par ceux qui étudient la musique, en conservatoire, école de musique ou en collège.

Le passage par la case « formation musicale » dans les conservatoires et écoles de musique est en général obligatoire, pour apprendre la théorie musicale de manière plus efficace afin de produire de la musique. Elle est constituée d’un cours d’une heure dans la majorité des cas pour les débutants. Le temps augmente avec l’expérience.

Qu’entend-on par « éducation musicale » ? 

L’éducation musicale en collège (de son nom complet éducation musicale et chant choral) est une heure fléchée sur l’emploi du temps. L’apprentissage de la théorie musicale est en partie amputé afin de produire la musique de manière plus directe, de se construire une culture musicale, de se construire un avis critique argumenté (et objectif) ainsi que de développer sa capacité rédactionnelle et ses présentations orales. Ce travail se range dans les compétences « Réaliser des projets musicaux d’interprétation ou de création » et « Explorer, imaginer, créer et produire ».

L’apprentissage de la musique est perçu de manière négative dans les cas cités ci-dessus. Dans le cas de l’enseignement au conservatoire, la pratique est souvent réalisée dans le cadre d’une activité extra-scolaire, hors, la formation musicale est une activité proche de l’aspect magistral. Et, la construction des cours, même si elle a évolué dans le temps, a un aspect rébarbatif et peu amusant : on rabâche sans cesse de la lecture de notes ou de rythme afin de gagner en fluidité la lecture de partition, comme on apprend à lire des syllabes, des mots puis des phrases. J’ai, pour mon cas, vécu ce moment comme un moment lent et ennuyant, qui perdait en intérêt après quelques minutes.

Rajeunir son apprentissage de la musique

Au collège, l’éducation musicale est considérée par l’élève comme un moment secondaire de l’emploi du temps, moins fatigant que les 3 ou 4 heures de français, mathématiques ou histoire hebdomadaires. Cette image est alimentée par les générations suivantes qui pensent que le « cours de musique » est un cours où on écoute de la musique classique et où on joue de la flûte. Récemment, lors des rencontres avec les parents d’élèves, on m’a encore fait la réflexion « ma fille aime la musique, elle chante à la maison, elle adore [citer le nom du dernier chanteur à la mode] ». Le cours d’éducation musicale a encore beaucoup de clichés à casser.

Il faut donc, à travers, ces moments, enlever ces idées pré-faites sur les longueurs et l’aspect inintéressant à travers des activités plus ludiques et interactives.

L’apprentissage par l’oralité

L’apprentissage par l’oralité est un procédé utilisé avant l’écriture musicale (développée à partir du Xe siècle). Il se réalise via un dialogue entre un soliste ou un groupe de soliste et un chœur qui répond au premier groupe. Dans les milieux populaires, cette transmission orale est un élément majeur dans l’apprentissage de la musique et des œuvres musicales : elle permet de connaître un chant assez rapidement et de véhiculer un message de manière efficace.

L’apprentissage par l’oralité est un point très important. Il permet de développer l’écoute et la compréhension des quatre paramètres du son (timbre, hauteur, durée, intensité). Le travail peut-être personnel avec un travail d’exploration de son propre corps ou en groupe avec un jeu de question- réponse ou d’imitation entre le chanteur et les auditeurs. Le groupe « réponse » va consciemment ou inconsciemment réfléchir aux paramètres du son à mettre en place afin d’imiter le groupe « soliste ».

En mobilisant son instrument ou sa voix et son écoute, on explore les paramètres qu’il suffit d’associer à un terme. C’est la répétition de ce processus qui permet de comprendre les paramètres.

La mobilisation du corps

La mobilisation du corps est un moyen de visualiser les différents paramètres qui composent un son et donc une partition. Le fait d’associer un geste à un acte musical a un impact plus fort dans l’esprit du jeune musicien.
Par exemple, pour chercher à faire une phrase musicale lente, on peut faire un geste lent et étiré avec le bras ou marcher avec des pas lents qu’on associe à la pulsation. Ce principe permet aussi de développer sa stabilité de vitesse et de prendre conscience du tempo d’une musique.

Pour évoquer le registre (aigu, médium, grave), il suffit d’ajuster sa hauteur de bras ou de corps, l’intensité par des petits gestes ou des gestes larges.

Le timbre peut se travailler à travers un jeu avec des accessoires qui imite de vrais instruments (un sifflet pour les bois, un goulot de bouteille pour des cuivres, ou des ficelles pour les instruments à cordes).

Par la suite, comme pour l’apprentissage par l’oralité, il suffit d’associer ce geste beaucoup plus visuel que pour un procédé d’imitation purement musical à un terme.

Casser la peur de la partition

Faire face à une partition est un passage difficile pour un inconnu ou un débutant : la musique est un langage et son apprentissage se rapproche de celui d’une langue. Les notes associées aux rythmes peuvent se comparer aux syllabes, un groupe de notes à un mot et on utilise, pour parler d’une succession de rythmes, le terme phrase, avec ses respirations et ses cadences.

Donner du corps à la partition : le système Stripsody

De la même manière que pour la mobilisation du corps et l’aspect visuel de la musique, on peut trouver un moyen différent de lire et donc d’interpréter une partition musicale. Cathy Berberian, compositrice du XXe siècle, utilise ce procédé avec Stripsody : l’artiste a créé une partition sous forme de bande dessinée et mélange le principe de partition musicale et la mobilisation du corps expliquée ci-dessus.

Une portée est sur 3 lignes (aigu, médium et grave) et la taille et les gestes du dessin évoluent en fonction de la hauteur et de l’intensité voulues par la compositrice.

L’association de la mobilisation du corps et d’une partition graphiquement non musicale permet donc d’imaginer les différents sons et paramètres du son puis de les retranscrire sous forme imagée. En toute cohérence, l’élève va faire une écriture adaptée à son geste.

Transformer la table de lecture musicale en… Bande dessinée !

Dans le cas suivant, pour un élève de 6e (entre 11 et 12 ans) : la consigne était de créer une partition sous forme de bande dessinée sur un thème (ici les animaux), en installant un décor et détaillant précisément les paramètres du son à réaliser. On comprend que l’ordre voulu est chouette – mouton – poisson – hibou, le rouge en gras montrant un hululement assez fort, la longueur du « beeh » un cri de mouton long et la discrétion du « bloup bloup » un poisson discret. En amont de la réalisation de la partition, l’élève a dû chercher ses sons à partir du thème, les interpréter, travailler et faire une analyse de son interprétation.

Conclusion : privilégier l’apprentissage par le jeu sans négliger la lecture théorique des notes !  

À partir de ces travaux, il est plus facile de raccrocher des élèves en difficulté de compréhension, des élèves non musiciens ou des élèves décrocheurs durant le cours. L’aspect ludique enlève toute forme d’appréhension ou de démotivation face à une partition, qui peut-être vue comme un document complexe et fait pour des spécialistes.

Comme pour tout enseignement, l’apprentissage sous forme de jeu, en mettant en scène le travail et les notions abordées, permettra une approche plus facile et plus compréhensible des bases de la musique.

Cependant, ces apprentissages pour un jeune public amateur ne peuvent remplacer dans sa totalité l’apprentissage théorique des cours, et donc la lecture de notes, de rythmes et tout autre travail de lecture ou d’écoute.

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