10 chefs-d’œuvre de compositrices à écouter absolument
Longtemps reléguées au second plan de l’histoire de la musique, les compositrices n’ont pourtant rien à envier à leurs homologues masculins. Talent, audace, émotion, innovation… Leurs œuvres, souvent méconnues, méritent d’être entendues, partagées et célébrées. Aujourd’hui, un mouvement de fond remet ces créatrices au cœur des répertoires, des scènes et des playlists.
Pour mettre en lumière la richesse de la musique composée par des femmes, du baroque à la création contemporaine, Newzik vous propose une sélection de chefs-d’œuvre incontournables. Derrière chaque pièce : une personnalité forte, une écriture singulière, une œuvre qui mérite pleinement sa place dans nos écoutes.
Préparez vos écouteurs ou vos partitions : voici 10 œuvres à découvrir et à (re)mettre au cœur de vos écoutes.
Pourquoi les compositrices sont-elles si peu reconnues ?
Si les noms de Bach, Mozart ou Beethoven sont universellement connus, ceux de Louise Farrenc, Clara Schumann ou Lili Boulanger restent encore marginaux dans les programmations. Pourtant, leur talent est indiscutable. Alors, comment expliquer cette invisibilisation historique des compositrices ?
Des obstacles structurels dès l’enfance
Pendant des siècles, l’accès à l’apprentissage de la musique a été fortement genré. Les filles pouvaient pratiquer un instrument, à condition que cela reste dans le cadre privé ou « de bonne éducation ». Mais composer ? Étudier la fugue, l’orchestration, diriger un ensemble ? Cela restait réservé aux hommes. Certaines institutions musicales, comme les conservatoires, leur ont longtemps fermé leurs portes ou ne leur ont accordé qu’un statut secondaire.
Une reconnaissance souvent empêchée
Même lorsqu’elles parvenaient à composer, les femmes étaient rarement publiées, jouées ou reconnues. Beaucoup d’œuvres ont été perdues, attribuées à des hommes, ou laissées dans les tiroirs. Certaines ont même signé sous pseudonyme ou gardé leurs créations dans l’ombre pour ne pas nuire à la carrière d’un frère ou d’un mari musicien. Fanny Mendelssohn, par exemple, a vu certaines de ses compositions publiées au nom de son frère Felix.
Des préjugés qui perdurent
La critique a longtemps considéré que les femmes ne pouvaient pas « rivaliser » sur le plan technique ou structurel avec les grands compositeurs. Trop sensibles, pas assez puissantes, disait-on. Ces clichés, bien qu’ébranlés, continuent de peser sur les programmations, les manuels et les habitudes d’écoute. Résultat : un répertoire immense reste encore largement méconnu du grand public.
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10 chefs-d’œuvre de compositrices à (re)découvrir
1. Clara Schumann – Concerto pour piano en la mineur, op. 7
Clara Schumann (1819-1896), pianiste virtuose et compositrice, a marqué le romantisme allemand. Son Concerto pour piano en la mineur, composé alors qu’elle avait seulement 14 ans, est un bijou d’émotion et de technique. L’œuvre révèle un équilibre parfait entre lyrisme et puissance dramatique, avec une écriture pianistique très inventive. Clara fut l’une des premières femmes à se produire en tant que soliste de concert dans toute l’Europe, ce qui était extrêmement rare à son époque. Ce concerto témoigne de son génie musical et de sa capacité à exprimer une palette émotionnelle intense.
2. Barbara Strozzi – Lagrime mie
Barbara Strozzi (1619–1677) est l’une des premières femmes compositrices à avoir publié de la musique sous son propre nom, dans une Italie baroque dominée par les hommes. Élève du compositeur Cavalli, elle fut aussi chanteuse et poétesse. Son air Lagrime mie (« Mes larmes ») est un véritable sommet d’expressivité dans le répertoire vocal du XVIIe siècle. Ce n’est pas un hasard si cette œuvre est souvent choisie par les grandes voix baroques actuelles : elle met autant en valeur la technique que l’émotion. Barbara Strozzi a publié 8 volumes de musique, un exploit exceptionnel à une époque où les compositrices étaient rares et souvent invisibles.
3. Louise Farrenc – Symphonie n°3 en sol mineur, op. 36
La française Louise Farrenc (1804-1875) fut compositrice et professeure au Conservatoire de Paris, une rare figure féminine dans le monde musical du XIXe siècle. Sa Symphonie n°3, composée en 1849, est une œuvre romantique puissante, souvent comparée aux symphonies de Mendelssohn ou Schumann. Cette symphonie se distingue par son orchestration riche, ses mélodies élégantes et sa structure rigoureuse. Farrenc a longtemps dû lutter pour la reconnaissance de ses œuvres, mais cette symphonie reste un bel exemple de son talent et de sa maîtrise.
4. Lili Boulanger – Psalm 130 (Du fond de l’abîme)
Lili Boulanger (1893-1918), première femme à remporter le prestigieux prix de Rome en composition, s’est imposée par la profondeur spirituelle et la modernité de ses œuvres. Son Psalm 130, composé en 1917, est une pièce chorale bouleversante qui mêle une écriture harmonique innovante à une grande intensité émotionnelle. Cette œuvre, inspirée du texte biblique, illustre la quête intime et universelle qui traverse toute la musique de Lili Boulanger. Psalm 130 reste aujourd’hui une pièce majeure du répertoire chorale, souvent saluée pour sa puissance expressive et sa beauté poignante.
Sa sœur aînée, Nadia Boulanger (1887-1979), fut également une figure majeure de la musique française, reconnue surtout comme pédagogue. Professeure au Conservatoire de Paris, Nadia a formé plusieurs générations de compositeurs à travers le monde, tout en poursuivant une carrière de compositrice et chef d’orchestre. Bien que moins connue pour ses œuvres que sa sœur Lili, Nadia Boulanger a eu une influence considérable sur la musique du XXe siècle, perpétuant ainsi l’héritage musical familial.
5. Judith Weir – A Night at the Chinese Opera (extraits)
Judith Weir, née en 1954, est une compositrice britannique contemporaine, actuelle maître de la musique à la Couronne d’Angleterre - une première pour une femme à ce poste prestigieux. Son opéra A Night at the Chinese Opera, créé en 1987, est salué pour son intelligence dramatique et sa richesse musicale. L’œuvre mêle avec finesse influences occidentales et asiatiques, en s’appuyant sur une pièce chinoise du XIIIe siècle. Weir y intègre une « pièce dans la pièce », chantée dans un style ancien, qui vient compléter et enrichir l’histoire principale, plus moderne. L’opéra illustre à merveille son art de la narration musicale et sa capacité à renouveler les formes lyriques traditionnelles.
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6. Amy Beach – Gaelic Symphony (Symphonie gaélique)
Amy Beach (1867-1944) est considérée comme la première compositrice américaine à connaître un succès national avec des œuvres symphoniques. Sa Gaelic Symphony, créée en 1896, s’inspire des mélodies traditionnelles irlandaises et écossaises, réinterprétée dans un langage romantique riche. Cette symphonie est remarquable par son lyrisme, son énergie et sa fraîcheur orchestrale. Amy Beach a su imposer une voix féminine forte dans un milieu musical fortement dominé par les hommes, ouvrant la voie à d’autres compositrices aux États-Unis.
7. Germaine Tailleferre – Concertino pour harpe et orchestre
Membre du célèbre groupe des Six, Germaine Tailleferre (1892-1983), compositrice française, est la seule femme à avoir participé à ce cercle de compositeurs français modernistes. Son Concertino pour harpe et orchestre, composé en 1927, est une œuvre lumineuse, joyeuse et pleine d’esprit. La harpe y est exploitée dans toute sa virtuosité, avec une orchestration légère et colorée. Germaine Tailleferre a su mêler modernité et élégance classique, et ce concertino reste une pièce phare du répertoire pour harpe.
Le saviez-vous ? Germaine Tailleferre est restée la seule femme du groupe des Six tout au long de son existence. Ce collectif, fondé dans les années 1920, était un cercle quasi exclusivement masculin, réunissant des compositeurs français influents qui cherchaient à renouveler la musique classique en rompant avec les traditions romantiques et impressionnistes. Tailleferre y a apporté une touche de fraîcheur, contribuant à façonner le son distinctif du groupe tout en affirmant son talent dans un univers majoritairement masculin.
8. Kaija Saariaho – L’Amour de loin
Kaija Saariaho (1952–2023) est l’une des compositrices les plus influentes de la musique contemporaine. Née en Finlande, elle s’est imposée dès les années 1980 par son langage sonore singulier, mêlant timbres raffinés, textures orchestrales complexes et traitement électronique du son. Son opéra L’Amour de loin, créé en 2000 au Festival de Salzbourg, a marqué un tournant : il s’agit du premier opéra composé par une femme à avoir été monté au Metropolitan Opera de New York depuis plus d’un siècle. Inspirée d’une histoire médiévale d’amour courtois, l’œuvre est traversée par des nappes sonores envoûtantes, une tension dramatique subtile et une poésie visuelle rare. L’Amour de loin a été salué pour sa modernité accessible et son esthétique immersive.
9. Unsuk Chin – Piano Concerto
Compositrice sud-coréenne née en 1961, Unsuk Chin s’est imposée comme une figure majeure de la musique contemporaine. Son Concerto pour piano, créé en 1997, allie virtuosité, complexité rythmique et textures riches. Cette œuvre a reçu un accueil enthousiaste pour sa capacité à conjuguer modernité et expressivité. Lauréate de plusieurs prix prestigieux dans le monde de la musique contemporaine, Unsuk Chin est reconnue pour repousser les frontières du langage musical actuel.
10. Florence Price – Symphony No. 1 in E minor
Florence Price (1887-1953) est la première compositrice afro-américaine à voir une de ses symphonies jouée par un grand orchestre américain (le Chicago Symphony Orchestra en 1933). Sa Symphonie n°1 en mi mineur mêle influences classiques européennes et thèmes inspirés du folklore afro-américain. Cette œuvre puissante et émotive est aujourd’hui redécouverte et célébrée comme un jalon majeur dans l’histoire de la musique américaine. Florence Price a dû surmonter de nombreux obstacles raciaux et sexistes pour faire entendre sa musique.
Redécouvrir la richesse du répertoire musical féminin d’hier à aujourd’hui
Clara Schumann, Kaija Saariaho, Amy Beach, Barbara Strozzi… Ces compositrices, et bien d’autres encore, ont contribué à façonner l’histoire de la musique avec autant de force, de créativité et de singularité que leurs homologues masculins. Pourtant, leurs œuvres ont trop souvent été mises de côté, ignorées ou oubliées. Aujourd’hui, redonner de la visibilité à ces chefs-d’œuvre, les écouter, les jouer, les programmer, c’est non seulement réparer une injustice historique, mais aussi enrichir notre rapport à la musique.
Du baroque au contemporain, du lied à la symphonie, ces créations féminines offrent une diversité d’univers, de sensibilités et de langages qui méritent pleinement leur place dans nos écoutes quotidiennes. Que vous soyez musicien·ne, curieux·se ou mélomane passionné·e, redécouvrir ces œuvres, c’est aussi mieux comprendre ce que les femmes ont écrit, composé et transmis à chaque époque, souvent bien au-delà de leur âge ou de leur époque.
🎧 Il ne vous reste plus qu’à tendre l’oreille.
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